La Guyane n’a pas fini de m’étonner : focus sur une espèce marine connue dans tout le département.

Nous sommes allés ce vendredi en groupe à la mer. Un coup d’œil sur l’horaire des marées : après s’être assurés que l’eau était haute, nous sommes partis pour 23h faire une balade sur la plage… pour voir les tortues luth !

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La plus grande des tortues de la planète – certains spécimens peuvent atteindre jusqu’à 2 m de longueur ! Elle passe sa vie au large et fréquente tous les océans ; ses principaux lieux de ponte se concentrent sur les plages de Suriname et de Guyane. Elle est caractérisée par l’absence de carapace proprement dite, remplacée par une cuirasse de peau à l’aspect du cuir. C’est une espèce en voie de disparition, menacée par la pollution, le braconnage et l’urbanisation du littoral.

La fin du mois d’avril marque le début de la période de ponte ou  nidification : la nuit, lorsque les lumières sont éteintes et que la température est plus clémente, les femelles surgissent par dizaine sur les plages de Cayenne à marée haute pour enterrer leurs œufs dans le sable.

A peine arrivés sur la plage que nous en apercevons une qui sort de l’eau. Elle est tout simplement gigantesque ! Silver fait partie de l’association Kwata pour la protection de la nature qui travaille à la protection et la conservation des tortues marines de Guyane notamment.

 Il connait donc les règles à respecter :

– ne jamais rester sur la trajectoire d’une tortue ;

– ne jamais l’éclairer directement, d’émettre des signaux lumineux à proximité ou de prendre des photos avec flash, au risque de la perturber ;

– ne pas s’approcher trop près ;

– les photos (au nombre réduit d’une par personne) ne peuvent être prises que de dos, au moment où la femelle touche l’eau pour repartir.

Évidemment, lorsque Kwata ne patrouille pas sur les plages, les gens font n’importe quoi. Toujours est-il que ce soir-là, nous ne croisons que très peu de personnes venues elles-aussi observer les animaux.

Assis à deux mètres de notre tortue, nous la regardons pondre. Dans le noir, je devine plus que je ne vois les œufs qui tombent. Il faut savoir que la nidification se déroule en plusieurs étapes, pouvant durer entre 1h et 1h30 :

  • Sortie de l’eau : la tortue luth va chercher le haut de la plage pour pondre ;

 

  • Creusement du nid : elle déblaye le sol avec ses pattes puis creuse un trou de 80 cm de profondeur ;

 

  • Ponte : c’est l’étape la plus longue, durant laquelle la tortue est immobile comme une statue. Les œufs sont ensuite enterrés : les pattes avant vont de haut en bas pour ramener le sable sur le nid, quand les pattes arrière effectuent un mouvement de balayage de gauche à droite de façon à tasser le sol ;

 

  • Brouillage des pistes : la tortue pivote sur elle-même pour cacher les traces de son passage et effectue d’autres chemins en boucles sur le sable pour brouiller les pistes du vrai nid ;

 

  • Retour à l’eau : elle reviendra dans 10 à 15 jours. En effet, la fécondation se déroule entre 4 et 10 pontes par femelle. Au total, une tortue luth peut pondre jusqu’à 1000 œufs en une année.

 

Nous apercevons au loin deux autres tortues qui sortent de l’eau, plus petites cette fois. Longue observation puis retour à la maison. Le lendemain soir, je retournerais sur la plage pour prendre quelques photos. Voici les deux seuls clichés que j’ai pris pour deux tortues différentes lorsqu’elles retournent au large après la ponte :

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Les œufs sont de couleur blanche, avec un diamètre de 0,5 cm et toujours accompagnés par des œufs stériles (la moitié de la ponte environ) dont l’utilité n’a pas encore été scientifiquement démontrée.

L’incubation dure alors 65 jours en moyenne et nécessite une température minimale de 26°C. A noter qu’entre 26 et 30°C, le sexe de l’animal reste aléatoire ; au-delà de 30°C, les bébés seront tous des femelles.

Rendez-vous en Juillet pour assister à l’éclosion !