Le terme azulejos désigne au sein de la péninsule ibérique un carreau de faïence émaillée orné de motifs, tant géométriques que figuratifs. Leurs dimensions traditionnelles sont de 12 à 14,5 cm de côté. Dans les contrées où ils puisent leur source, ils habillent aussi bien l’intérieur des bâtiments que leurs façades.

Échantillon d’azulejos géométriques. Source: http://minhacasaminhacara.com.br/wp-content/uploads/2011/10/azulejo_portugues.jpg

L’art de fabriquer et décorer les azulejos a connu un fort développement au XVème siècle en Andalousie, tandis que le XVIIIème siècle vit son apogée au Portugal. Les vestiges comme les pousses renaissantes de ce puissant mouvement créatif sont donc pleinement visibles au sein de ces deux zones.

L’on pourrait croire à tort que le terme azulejo provienne du mot désignant la couleur bleue en portugais et en espagnol, i.e. « azul ». Il n’en est rien, puisqu’il doit en réalité ses origines à « al zulaydj », qui en arabe signifie « petite pierre polie ». La couleur bleue ayant été amplement utilisée pour les azulejos, cela peut prêter à confusion en ce sens. Cette étymologie s’explique en fait par les prémices de l’art des azulejos, qui s’inspiraient des mosaïques romaines, assemblages de pierres polies de petite taille.

L’arrivée de cette technique sur la péninsule ibérique fut l’un des nombreux apports de la présence des Maures. Eux-mêmes avaient eu pour maîtres dès le XIIème siècle des artisans chinois, avec lesquels ils commerçaient via la route de la soie. Du fait de l’interdiction de la figuration par l’islam sunnite, les motifs ornant les azulejos durent en premier lieu se cantonner à la géométrie. Il en résulte des variations à l’infini sur ce thème, telles que nous pouvons les admirer aujourd’hui dans toute l’Andalousie, et par-delà la frontière, au Portugal.

Façade de Lisboa. Source: http://www.veniceclayartists.com/wp-content/uploads/2016/02/Viuva-Lamego-Lisboa-%C2%A9Luis-Novo.jpg

Il faudra attendre la fin du XVème siècle pour que la décoration des azulejos devienne figurative, et ce seront alors de multiples scènes religieuses qui verront le jour le long des murs des patios et des façades des palacios de familles aisées. Des dessins profanes suivront par la suite, au fur et à mesure de la démocratisation de cette technique.

Au cœur de cette histoire de l’azulejo figuratif, Sevilla trône en bonne position. On estime en effet que les tout premiers azulejos figuratifs furent peints à Sevilla aux environs de 1500 par un certain Francesco Niculoso, originaire de Pisa. On lui doit notamment les panneaux de la chapelle de l’Alcázar de Sevilla.

Sevilla est donc aujourd’hui l’une des destinations phares afin d’admirer ces beautés que sont les azulejos, au coude-à-coude avec le Portugal. La Casa de Pilatos, dont vous pourrez apercevoir quelques exemplaires dans les prochains articles, contient des panneaux considérés comme les plus beaux d’Espagne.

Au Portugal, Lisboa est la figure de proue d’un art qui s’est propagé dans tout le pays, et a permis l’émergence d’ateliers de renommée mondiale. Il s’agit in fine d’un moyen d’expression bon marché, et comme le formule joliment ce dossier de l’Institut Camões, il témoigne d’une certaine « horreur du vide ». Il est ainsi complètement impossible de se poster en un point donné de Lisboa dénué d’azulejos, car ils recouvrent toute surface apte à les accueillir.

Parque do Eduardo VII, Lisboa. Source: https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/9a/Parque_do_Eduardo_VII_%285580997640%29.jpg

En 1929, Sevilla hébergea l’Exposition ibéro-américaine. Ce fut l’occasion d’afficher fièrement son héritage culturel, d’où la création d’une Plaza de España aux azulejos remarquablement conservés. Recouvrant 5 hectares et conçue par l’architecte Aníbal González, elle abrite en effet toute une série de bancs recouverts d’azulejos. Ils représentent 48 des 50 provinces espagnoles, chacune accompagnée de sa carte, son blason et les temps forts de son histoire.

Si les siècles passés nous ont offert de sublimes spécimens d’azulejos, la création par le biais de ce support n’est pas prête de s’arrêter. En effet, la pratique de cet art perdure aujourd’hui, particulièrement au Portugal, et parmi ses adaptations modernes l’on peut citer des panneaux en hommage à de grandes figures du passé, des pans muraux tels qu’on peut en croiser dans le métro de Lisboa, des œuvres conçues à l’occasion de fêtes religieuses…

Ayant croisé au cours de mes pérégrinations une multitude d’azulejos divers et variés, vous trouverez à la suite quatre articles vous présentant une sélection de mes photographies, classées de la sorte :

Pièces de musées

Bancs publics

Détails

Vues d’ensemble

Vous vous en doutez sans doute arrivés à ce stade de l’article, les azulejos m’enchantent. Ils subliment les édifices, et l’on n’a de cesse de s’émerveiller d’en apercevoir parmi les ruelles étroites de Sevilla ou Lisboa, le nez en l’air. Ils se mêlent au bleu limpide du ciel, comme si les artistes avaient rêvé atteindre celui-ci pour l’orner de leurs songes éveillés.

Cortegaca, Portugal. Source: http://www.veniceclayartists.com/wp-content/uploads/2016/02/jesuscm-flickr.jpg

A l’intérieur des maisons andalouses, dans un écrin de fraîcheur et de silence, ils savent surprendre et se mêler astucieusement aux statues et tableaux, par leur placement judicieux.

J’espère que, tout comme moi, vous apprécierez ces trésors artistiques, art vivant appréciable depuis la rue, accessible à tous et à toutes.

Assez de paroles, en avant pour les images !