Oublier Palerme, Edmonde Charles-Roux
Oublier Palerme… Un titre évocateur qui était voué à m’attirer en raison de mes origines siciliennes. […]
Oublier Palerme… Un titre évocateur qui était voué à m’attirer en raison de mes origines siciliennes. […]
Beloved, Toni Morrison (1987) Toni Morrison - Source: http://www.babelio.com/users/AVT_Toni-Morrison_7386.jpeg Vibrant, profondément humain, ce roman nous renvoie à nos incohérences et nos méfaits, et résonne particulièrement dans ce contexte troublé où les "affaires Ferguson" n'ont de cesse de se reproduire outre-Atlantique. L'après 11 janvier et les dernières élections semblent être d'autres signaux d'alerte puissants nous incitant à déjouer ce genre de situations. Toni Morrison, mythique romancière américaine, nous rappelle où loge notre humanité, notre orgueil et nos firmaments. Ce livre est beau, tout simplement. Loin de la froideur des faits détachés de toute réalité, elle nous ancre dans des destins brisés, des êtres profondément blessés et qui ont chacun leur manière unique de vivre après ces traumatismes. Ses propres mots sont comme suit: "I wanted to show the reader what slavery felt like, rather than how it looked." Dans Beloved, nous suivons ainsi les destinées de trois femmes noires suite à la Guerre Civile (1861-1865), dans l'Ohio: Sethe, sa fille Denver et Beloved, personnage dont je ne révèlerais pas l'identité, afin de ne point gâcher l'effet de surprise. Le thème central de Beloved est en définitive le lien intangible entre les vivants et les morts, le dialogue qui peut s'établir entre eux, et les méandres qui conduisent de l'oubli à la réminiscence. En s'inspirant d'un fait divers qui avait défrayé la chronique en 1856, Toni Morrison nous fait vivre et ressentir les mesures désespérées auxquelles les ex-esclaves ont dû se résoudre pour sauver ceux qu'ils aimaient d'endroits et de personnes emplis d'horreur. Le véritable personnage central de ce livre n'est pas Beloved, contrairement à ce que le titre du roman pourrait laisser croire, mais bien Denver, dont les circonstances de naissance incroyables sont un refrain, [...]
Il est des livres qui vous touchent en pleine âme, jets d'encre fusant à travers le temps jusqu'à infuser dans vos veines. Des livres qui n'étaient qu'une lointaine évocation dans les années précédant votre confrontation directe, quasiment charnelle, avec eux, et qui n'en ont eu que davantage d'impact sur votre être. Les Mémoires d'Hadrien, écrits par Marguerite Yourcenar en un quart de siècle, constituent l'un de ces livres, où le lecteur reçoit un écho à ses pensées ou émotions. Sur son lit de mort, l'empereur romain Hadrien (76-138) adresse une lettre au jeune Marc Aurèle, son petit-fils adoptif. Cette lettre devient un prétexte à l'évocation d'une vie consacrée à la paix, l'écoute de l'autre, les voyages dans tout l'empire, l'art, la prise de décisions ardues, et, avant tout, à l'amour. La grande passion de sa vie fut le jeune Antinoüs, avec lequel il partagea quatre années dont le récit illumine ce roman. Cette passion eut un dénouement fatal: Antinoüs, idéaliste et craignant de perdre l'amour d'Hadrien, décide de prolonger la vie de l'empereur par son suicide dans le Nil, à l'âge de vingt ans. Dans son esprit, il s'agissait également de muer un sentiment amoureux par trop éphémère en une éternité mémorable, avant l'indifférence et le rejet. Hadrien, via la plume de Marguerite Yourcenar, évoque sa souffrance extrême suite à ce drame. Il fonde une ville en son honneur au bord du fleuve qui l'a emporté, Antinoupolis, et déifie son compagnon disparu. Le culte d'Antinoüs deviendra par la suite la dernière grande religion avant l'éclosion du christianisme. De nombreuses statues furent sculptées à l'effigie du jeune Grec, et il est fort probable que vous ayez croisé son profil lors de vos pérégrinations, puisqu'il est devenu, grâce [...]
Champ de tournesols de la Finca La Canaleja, INIA d'Alcalá de Henares (2013) Deuxième promo de livre espagnol, en exclusivité pour vous! Ma lecture de « Cien años de soledad » tout juste achevée, il m’a immédiatement fallu coucher sur le papier mon ressenti au sortir de cette œuvre magistrale de la littérature hispanophone. Reconnaissons-le tout de suite, rien d’étonnant à ce que l’auteur ait obtenu le prix Nobel pour ce livre. Il y décrit une famille sur six générations, et ce avec une justesse inconcevable, la décortiquant dans toutes ses facettes infinies : ses incompréhensions, malentendus, liens, secrets, tabous, et même son absence. Les personnages sont tous si humains que cela relève du génie pur. N’importe quelle personne aurait matière à se reconnaître dans l’un de ces êtres, qui ont tous cet équilibre délicat entre défauts et qualités, comme les êtres déambulant dans le monde réel, et non celui des esprits animés par la plume. Son seul défaut est inhérent à sa construction même, et repose dans la kyrielle démesurée de personnages arpentant ses pages, dotés de noms souvent identiques, ou tout du moins proches phonétiquement. En témoigne cet arbre généalogique de la famille Buendía, foisonnant tout autant que replié sur lui-même. Il m’aurait été bien utile à plusieurs reprises, quand je confondais les dix-sept Aurelianos avec l’Aureliano originel, l’Aureliano Segundo ou l’Aureliano José. Source: http://mislecturasdelclub.blogspot.fr/2012/02/cien-anos-de-soledad-gabriel-garcia.html L’épisode m’ayant le plus marquée dans cette immense épopée est certainement celui du syndicat de l’entreprise bananière. Après des grèves et manifestations innombrables en vue de l’évolution de leurs conditions de travail tout à fait indécentes, les ouvriers de cette plantation voient débarquer un beau matin l’armée, qui les somme de se réunir sur la place de la ville. Le [...]
Aujourd’hui, je vous propose de déroger à notre sacro-sainte règle de l’article illustré par mes clichés plus ou moins bien cadrés et exposant mes pérégrinations. Car aujourd’hui, ce sera une recommandation de bouquin en espagnol, youpi! A tous ceux qui se sentent d'ores et déjà victimes d’une prise d’otages déloyale, effectuée par une bibliophile sociopathe, fuyez vite, avant que le refrain de « Come together » ne vous attache définitivement à cette page ! Vous ne pourrez vous empêcher de vous dandiner après cela, et les souris ont tendance à être peu coopératives sous des doigts reliés à un bras agité de manière sporadique. Ceci étant dit, parlons un peu de ce merveilleux livre, offert par Marimar lors de mon séjour chez elle. Car non, elle ne s’est pas contentée de m’héberger, quitte à être extrêmement généreux, autant aller jusqu’au bout, n’est-ce pas! Me voici donc en possession d’un livre, écrit pour moi semble-t-il, et dont le titre m’était déjà familier avant mon arrivée en Espagne. Ce chef-d’œuvre de la littérature sud-américaine fut publié en 1976, et immédiatement interdit en Argentine, du fait de son sujet: deux hommes partageant une cellule dans la prison de Buenos Aires, l’un accusé de corruption de mineurs (i.e. d’homosexualité) et l’autre d’actes politiques subversifs (i.e. d’être communiste). A partir de cette situation, l’auteur tisse un long dialogue entre les deux personnages, à peine interrompu par quelques documents à la froideur administrative, dialogue qui constitue un véritable révélateur de leur complexité. Le détenu homosexuel se comporte comme une Shéhérazade des temps modernes, contant des films vus dans sa vie d’homme libre afin de permettre leur évasion spirituelle de ce morne lieu. Ce qui est tout bonnement incroyable dans ce livre est son apparente simplicité [...]
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